Archive for the 'sous l’eau' Category

Jeanne?


Fort en gueule, on ne l’avait jamais vu sur une barricade,
car en bon mercenaire des sentiments il évitait soigneusement tout conflit armé,
mais à l’entendre ils les avait tous fait,
l’Indo, l’Algérie, le Katanga,
il en avait cassé du niakoué, du macaque et d’autres que je ne dirai pas…
Oh! oui! tonton Georges adorait en fiche plein la vue aux filles…
« Oh, les jolies vacances
quand une tante Jeanne venait.
Oui, les jolies vacances
que notre tonton se payait
. »
Quand le caporal le trouva sous le lit, mort de trouille après une alerte, la chose fit le tour du bled… Il ne se laissa pas démonter et changea de caserne…
ça tomba bien, la femme du lieutenant était pas mal!
« ad’jupette de carrière » dit ma mère!

Pleine lune au bout du doigt.

Sur mon plancher le bol me jouait des tours,
la pleine lune dans l’après-midi.
Et s’il n’y avait pas que du Lapsang souchong dans ce thé? me dis-je.
Elle me tendait son petit visage lunaire et sa peau, qui n’avait pourtant pas la couleur du breuvage, ressemblait étrangement à cette faîence aux grains de beauté épars.

… une autre variante.CLIC!

Toujours Ponge.



« … Puis s’incline sur son assiette et se noie dans son aliment. »
« C’est ultime ça! » dirait Fabrice L.

Hortense, il y a des mûres.

Lubudi, le 21 Janvier 1948.
* * *
Je n’ai pas aimé, cette nuit, vous lire
le courrier est arrivé avec deux semaines de retard,
cette version des choses sur mon silence
mur chagrin face au mur de silence
mur des lamentations face à mur d’indifférence
si c’était pour me sortir de cette bulle d’aphasie
cette apnée de chagrin,
c’est réussi!
après cette fin de non-recevoir, vous voudriez que je me répande en larmes au sol, pour vous montrer combien j’ai mal de vous.
Désolé de vous décevoir, les raisons qui vous font rester en Europe, vous regardent et je les accepte… Mais ne me demandez pas l’impossible.
J’ai choisi cette vie en Afrique,
cette Afrique qui « nous » tend les bras,
et, vous ne voulez pas m’y rejoindre, soit!
séparons-nous, vu que tel est votre désir, vous me dites que vous garderez l’enfant…
Les juges vous donneront raison et j’en serai quitte pour une pension alimentaire jusqu’à sa majorité,
si tout va bien.
Nous sommes en 1948, cette terre a besoin de suppléments d’âmes pour se développer,
j’y enseignerai ce que je sais.
Après cette guerre qui nous a volé notre adolescence,
je ne veux pas reconstruire en Belgique…
Je désire me reconstruire loin de cette terre qui m’a pris tant d’être chers.
Je n’y ai plus d’amis…
Chers disparus dans les camps.
Chairs disparues…
Et la vôtre maintenant.
Ne me demandez pas de revenir et encore moins de vous écrire;
le continent noir vous invite et vous faites la sourde oreille;
restons en là de cette correspondance vaine,
juste bonne à alimenter la défense de votre avocat.
Plutôt que d’explorer un continent vous préférez l’alcôve de votre maison parentale, de la cave au grenier fouillez les photos de vos souvenirs et affichez cet air de mater dolorosa qui vous sied à merveille, j’ai tous les torts, je sais, vous ne pouvez pas comprendre… Doublement déchiré par cette rupture et ce déracinement que je m’inflige, ne me rejoignez pas puisque telle est votre volonté.
L’humeur vagabonde je m’en vais cueillir des mûres,
il paraît que ça pousse par ici.
Ou sont-ce des fraises?
L…
ps: je vous joins une copie de ce texte que nous avions découvert ensemble, lors de cette nuit folle à Liège

(Francis Ponge) « Le Parti pris des choses », 1942.

Les vagues à lames.




L’idée est de les faire fonctionner en même temps et de se laisser envahir par le bruit des flots et non le flot des mots.
(dédicacé à Lephauste pour le blues du week end)

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