Archive for the 'Lubumbashi lambeaux' Category

Petit aparté… Autour du 24. 09.’91 à Kinshasa.

L’autre soir, j’étais chez des amis à l’occasion d’une « auberge Espagnole » (l’évènement fêté était tout autre, ça, je ne l’ai su que plus tard!)
et, en attendant les retardataires, nous décrivions nos vacances respectives aux quatre points cardinaux: les uns avaient découvert Istanbul pendant une (trop) courte étape puis avaient fait de la rando en Bulgarie, les autres étaient allés dans le Sud (là où il ne fait pas bon être fleur, tant la température monte dans les alambics) se frotter à l’extraction d’huiles essentielles de lavande et autres fragrances …
Suskind nous l’a décrit mieux que moi!
quand à bibi, avec ce “voyage” si peu ordinaire dans le temps, je bichais de donner en primeur et en ménageant les effets (vous me connaissez) l’émerveillement de ce que j’étais allé y chercher, tout en temporisant et rappelant que mon copain et moi devions être à peu près les deux seuls touristes au Congo à ce moment là…
Parlant de l’état pitoyable de la situation là bas, je sors, de ma poche, un billet de 500 F.C. valant environ 0,66 $ et le donne à mon pote qui fêtait ses 35 ans… Avec une boutade du style: « tu t’achèteras ce dont tu as envie, je n’avais pas d’idée. »
35 ans quel bel âge!
il ne m’avait pas dit qu’il passait le cap, le sot!
et puis ça ne se fait pas d’arriver sans cadeau;
mais ce n’est pas de ça dont je voulais vous parler.
Sa compagne s’esbigne en douce et reviens avec un petit “album-photo-décoré-en-plastique-ringard” qu’elle me tend (je m’aperçois du pléonasme en le tapant) je considère la chose avec ce qu’il faut de considération vis à vis d’un objet A5 tel que celui-là…
Ne pas froisser les susceptibilités sur les choix esthétiques, tel est mon credo…
Autre façon de dire « les goûts et les couleurs… »
Je l’ouvre et trouve “sa” petite collection de billets de banque du (déjà) Zaïre cher à Mobutu avec les billets gravés à l’effigie du dictateur sur les zaïres (ça va “Zaïre” du portefeuille disait-on à l’époque… Le Belge est espiègle, quand même!)…
Chaque billet soigneusement rangé avait son petit emplacement, bien plié dans sa désuétude, sa dérisoire inutilité monétaire…
C’est alors qu’au détour d’une de ces pages de plastique, je tombe sur cette lettre, pliée en quatre, de sa main, à 11 ans …
Elle m’invite à la lire.
En ‘91, ses parents étaient à Kinshasa et, pour changer, le pays était agité de troubles en tous genres… Tout comme plus tôt les guerres Katangaises ou l’avènement de Joseph-Désiré (sic) Mobutu (pas encore Sese Seko Kuku Ngbendu wa Za Banga etc.) en ’65 avaient semé un vent de panique voire de terreur dans la population blanche…
A quelques années de décalage, je croyais lire une missive que j’aurais pu écrire, 20 ans plus tôt, dans des conditions identiques…
Mais laissons-lui la parole…
Diane, je te remercie de me permettre la diffusion de ce document, les fautes d’orthographes restent savoureuses, mais la pensée, cette petite pensée inquiète d’une enfant de onze, reste, par delà les mots.
C’est à la recherche de ces sensations là, que je suis, dans mon travail de plasticien…
Et pourtant, un cadeau d’anniversaire à 0,66 $ qui dit mieux?…
Mais ce cadeau-ci, lui, est et reste inestimable.


Pour ceux que ça intéresse « whisky-pédia » a un article relativement objectif sur la situation politique de cette époque.

Variation autour de la danse.



… En ce début de week end,
je n’ai pas pu m’empêcher.
« Sweet dreams are made of this… »
Disait Annie.
Suspense…

Boîtes postales vs portables… Sont barjots ces opérateurs.





De cette poste il n’en reste rien, juste la façade qui…
Comme son nom l’indique.
Sur le côté, à gauche, ils ont refait les cellules, en vitrines de petits commerces apparemment…
« Notre » boîte était là.
Plus de boîte!
« mâche ta chique jeune matelot! »
à droite, ce n’est pas encore « réaménagé » (et loin de l’être): certaines boîtes sont bâillonnées par un chiffon pour être sûr qu’elles ne cracheront plus leurs bonnes et leurs mauvaises nouvelles ou plus simplement elles ont été remplacées par un étalage compliqué en bois où l’on a refait à l’identique les anciennes cellules à courrier…
Faire et défaire.
On a juste envie d’y mettre ses chaussures ou sa trousse de toilette.
L’imbroglio des boîtes manquantes, à moitié défoncées (quand ce ne sont pas des trous béants) me remémore ce glorieux passé épistolaire où les gens avaient encore à coeur d’écrire ou de communiquer toutes les semaines avec la famille restée en Europe…
Plus de « Mes chéris… » ou de « Chers vous cinq,… »
Lettres mortes.
‘A p’us!…
Miracle, aussi, de ces boîtes qui pourvoyaient, aux fêtes, les petits cadeaux venus de l’autre continent.
Les plus gros, c’étaient à l’intérieur que nous allions les chercher.
‘A p’us non plus!…
Justement, l’intérieur parlons en…
Des gens sont agglutinés, comme aux heures de pointe, ils n’attendent ni bus ni métro,
mais l’occasion de marchander l’un ou l’autre appareil mobile…
Ou de le faucher, plus simplement…
Tu ne poses pas un doigt dans le hall sans faire un sms par mégarde…
« Ils sont venus, ils sont tous là » (sic) ces portables de toutes marques,
ces modèles de tous poils,
Le port d’arme est, bien entendu, prohibé…
C’est marqué à l’entrée.
C’est aussi la bourse des opérateurs…
Sont barjots avec leurs offres de rooming à prix bas:
la carte sim aux code pin magique, sésame du texto, se vend par centaine, ici, chaque jour…
« T U? 1 bbq c’we?:O) »
Faudrait être timbré pour vouloir encore poster une lettre.
Je n’enverrai pas de cartes postales…
Quelles cartes postales, d’ailleurs?
« L son U ? » (sic).

La rue Msiri.


Après une semaine où la tension montait de jour en jour, nous nous sommes retrouvés dans cette maison au microcosme parfait.
A l’abri de ses hauts murs dépourvus de tessons de bouteilles et de rouleaux de barbelés (chers aux maisons Luchoises) nous nous y sentions en sécurité.
Il y avait, là, tout en plusieurs exemplaires: Jacarandas, flamboyants, goyaviers, avocatiers, papayers, palmiers, manguiers, même de la canne à sucre…
Le château d’eau, les coupures de courant et d’eau (forcément vu que la pompe était dépourvue de Shadocks), sorte de petit Far West ou la latérite se redessinait et se nourrissait inlassablement des empreintes de nos pas, tableau vivant de poudre rousse, à l’échelle humaine…
Je n’aurais pas eu l’occasion de visiter la maison de mon enfance, que celle-ci m’aurait suffit.

La mission.


Dans cette mission Franciscaine de Lukafu tout est réunit pour faire le matin du Monde chaque jour… Sur le grand plateau de la Lufira où celle-ci coule, alimentée par les chutes de la Lofoï, non loin du parc des Kundelungu qui présente une succession de hauts plateaux et collines de savane échelonnés entre 1.200 et 1.700 mètres d’altitude…
Dans cette mission disai-je, on est instantanément projeté au temps de Rimbaud ou d’Henry de Monfreid, tant ces vieilles bâtisses, simples et basses, prennent l’or du matin pour ne le rendre qu’au soir…
On y trouve un dispensaire, une école primaire d’un millier d’élèves (un instituteur pour cinquante gamins) et une école secondaire de huit cents étudiant (même nombre de profs par tête de pipe), de même qu’un internat de soixante lits pour les garçons et de quarante pour les filles, cinq bassins de piscicultures avec des poissons de la rivière (qui coule pas loin j’ai dit) et, bien sûr, une église tellement vieille que les murs s’affaissent.
Le père Raoul a décidé de la refaire en l’augmentant toutefois de deux ou trois mètres sur les côtés, on ne sais jamais, d’où cet intéressant phénomène de liturgie se passant sous le toit de l’ancienne, pas encore abattue, et de la nouvelle dont les murs entourent, à ciel ouvert, la foi de ses paroissiens.
Nul doute que l’Abbaye de Cluny aura bientôt des raisons de l’envier…
Ce qui est un péché.

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