Archive for the 'fragments' Category

La poussière comme encore collée aux semelles…



Dire que je suis heureux est en dessous de la vérité…
Ne pas le dire serait mentir.
Mais la joie n’empêche pas de voir la réalité…
Il me faut rentrer.
Des valises plein les yeux,
des balises dans les cieux,
le temps de déballer tout ça et je vous raconte ce vol intérieur
d’où l’on revient (pas tout à fait) lavé des scories du passé.

Il équateur moins le quart, je dois bientôt y aller.


Où je vais, il n’y a pas d’ours polaire.
Plutôt malachite que pierre ponce…

Herr Mëss, Ernest & Loubna… Tintin pour le knout.


Il avait commencé par « My Friends,
There was once a very lovely and frightened girl
She lived alone except a nameless cat… »
En revoyant ces images de Georges Peppard tapant à la machine,
ressortir la vieille Hermès du grenier était forcément le second acte…
Oui, l’Underwood eut été mieux…
Mais bon! comme disait l’autre à propos de la technique (Duane Michael pour ne pas le citer):
« On n’a jamais entendu Hemingway parler de la marque de sa machine à écrire. »

Qu’est ce que je disais moi?
ah oui! comme je ne suis pas Hemingway,
je peux en parler, de ma machine, moi;
donc je sors la vieille Hermès de sa caisse jaune…
Autant dire sortir une morte de son caveau,
tellement elle est lourde la vache!
La demi-heure pour retrouver comment débloquer
ce ‘tain de rouleau à la noix°õ^… de fait ch…!
Et puis l’enchantement fait place à la magie
(ou le contraire, je ne sais plus)
la feuille glissée par l’envers
ce son inimitable s’installe dans la pièce,
les tiges, trop vite sollicitées, s’emmêlent les pinceaux,
le ruban encreur monte et descend au rythme de la frappe hésitante.
Pianistiquement poids et frappe à infliger aux touches,
doivent être sûrs et francs,
sous peine d’assister à des lettres à moitié imprimées
trahissant par là même l’hésitation de la pensée
le blanco sur la faute,
le retour en arrière d’une lettre,
le plaisir des « x » biffants les autres lettres,
palimpsestes de l’acte manqué.
Bonheur!
on est loin de ces touches à fleur de doigts des « nordis » qui en un clin d’oeil vous font paraître Ouagadougou ou le Soudan à deux pas de la demeure tout en tapant votre mail à Suzette trois pâtés de maison plus loin… (Oui elle s’appelle Suzette! et alors, ça dérange quelqu’un?)
Mais! voila que ça recoince…
Quinze minutes de nouveau sous le capot pour voir ou ça couine de la mécanique…
Pour se rendre compte que c’est Robert, le bouquin à côté, qui bloque le chariot… Je dois être Belge ou blonde, parfois… Ou les deux! souvent.
(Un peu comme le mec qui se relève après avoir lacé sa chaussure et qui marche sur sa cravate).
Je ressors de la salle des machines tout dégoulinant aux pourtours du marcel filet de pêche, le dico à distance cette fois-ci, revisse ma casquette et continue à faire semblant d’écrire « Out of Africa » ou « le vieil homme et l’amer » (sic)…


Roule ma poule, je vais te redonner une seconde jeunesse, me dis-je.
Me suis mis Chet Baker, en vinyl bien sûr…
Ne manquaient que le Teppaz et le Bourbon et à moi Dashiell Hammett…
Je vais écrire sur Loubna, cette journaliste Soudanaise menacée de quarante coups de fouet pour avoir porté un pantalon… (si! si!)
Au besoin j’envoies Sam ou Bruce pour la délivrer des griffes de herr Mëss l’affreux…
Sans tomber dans Oss117 toutefois.

L’Hottentot ne rentra pas trop tard ce soir là.


Cependant que l’authentique Hottentot,
Pinocchio involontaire
face au cornet gravant la cire du rouleau,
racontait sa race et sa langue,
scandant du geste ses mots et ses claquements de langue…
Khoïsan inintelligible pour le vulgum pecus que nous sommes,
peut être que ce petit bonhomme
(déguisé à dessein par l’homme blanc?)
ne disait rien d’autre
que ce que Terence Davies nous raconte
dans « Of time and the city »,
(vu hier à l’Arenberg):
* * *
« We love the place we hate,
then hate the place we love.
We leave the place we love,
then spend a lifetime trying to regain it.

Come closer now
Come closer now and see your dreams.
Come closer now
Come closer now and see mine. »
* * *
Si les images, du film, restent discutables…
Le texte, lui, reste d’une belle tenue,
J’aime définitivement (definitly!) ce recul et cet humour qu’ont les Anglais sur l’existence
(Chr°n° va sourire)… Et puis, tout comme Agnès Varda et ses « plages »,
je reste profondément curieux de ce travail sur la mémoire,
fait de bribes et de lambeaux épars.
* * *
Adieu petit aborigène disait Dutronc à la fin d’une chanson.

« Il n’y a que le whisky qui cuite à Kikwit » (La Valentin).


………………………………………………………………………………………………………………Kikwit, le 25.VII.1972.
Dans ce petit poste, de fin fond de brousse, ressemblant à s’y méprendre à une certaine Edith,
madame Valentin régnait sur tout son petit monde avec un crochet de fer dans un gland de velours.
Elle faisait quinze ans de plus mais n’en avouait que cinquante-huit au moteur, pourtant…
Son hôtel était propre, mais pas trop, et la douche dans le coin de la chambre, donnait le ton, se résumant à un seau percé, suspendu à un crochet au plafond: actionner la ficelle donnait droit à 20 litres d’eau et pas une goutte de plus… Le rinçage restait donc périlleux en cas de trop grande énergie sur le pain de Marseille… ça apprenait l’économie.
Pour les plus optimistes, sur les problèmes de robinets qui fuitent (sic), le contact désagréablement rêche du tissu, aux endroits non rincés, guérissait de toute récidive sous cette latitude…
Aller remplir le seau au fond du couloir restait une aventure…
Drapé dans le pagne de l’essuie de bain,
à moitié glissant sur le béton lisse et peint,
il était difficile de faire bonne contenance en cas de rencontre fortuite…
La patronne, à propos de rincé, était déjà au goulot, potron minet, sur sa terrasse (face à cette route qui lui donnait son pesant de voyageurs dans le temps) considérant, à travers les vitres de ses yeux, la rouille de cette latérite sèche, son « whisky on the rocks » en embuscade: prisonnier de ses crochets trop maigres le Johnny Walker tremblotait légèrement, comme sous l’effet d’une légère brise…
La fonte des glaces, elle l’étudiait depuis longtemps, bien avant que ce ne soit à la mode…
Une visionnaire, La Valentin, j’vous dis!
Sur la table, une demi tartine grillée de connivence avec le pot de confiture, achevaient l’alibi du petit déjeuner: ces deux là savaient qu’il ne leur arriverait rien ce matin…
C’était le verre qui passait un mauvais quart d’heure!
Elle avait délégué la cuisine au « chef » lui laissant au passage les recettes de ses petits plats… Alphonse, qu’il s’appelait, grand black pas tout à fait trentenaire, tout en muscle et sourire Steenway, genre « a-bilive-a-can-fly », qui apportait le petit dèj. d’un pas nonchalant, disposant couverts et confitures dans une demi calebasse à côté d’un café, jadis chaud-bouillant, dans un récipient improbable…
Pourquoi je vous raconte tout ça moi?…
Ah! oui… Alphonse!… Avec son tablier « bon appétit » lui donnant un look à la Victoria Abril dans « gazon maudit », le short en plus…
Pour le reste vous pouviez profiter de cette anatomie sans défaut dont le mètre cinquante-sept de sa patronne se réjouissait pendant la sieste…
« Quelle aubaine cette ébène! » devait-elle se dire, entre deux hoquets.
Le métissage des races et l’écart des générations elle avait compris depuis longtemps…
Une visionnaire, La Valentin, j’vous dis.
Depuis le décès de son mari, sept ans plus tôt,
du temps qu’il y avait des clients… Elle avait compris.
Une visionnaire, La Valentin.
Mon père et moi allions nous asseoir quand…
………………………………………………………………………………………………………………………..(à suivre) peut être.

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