« La syntaxe et le taxi. » (Ceci n’est ni du La Fontaine ni du Marcel Aymé… Je parle du titre ‘videmment).
En arrivant à Saigon le type du taxi me parle anglais
puis me pose une question sur ma provenance et, instantanément, avec un grand sourire entendu, change son sabir
Je comprends de moins en moins l’anglais me dis-je…
J’écoute un peu mieux tout en comprenant de moins en moins
En aquiescant poliment je redouble d’attention, pour comprendre ce que ce monsieur cherche à exprimer.
Peut être que ce breuvage à l’aéroport était drogué, me dis-je…
Puis,
au détour d’une phrase,
je reconnais des mots
et m’aperçois que nous sommes passé du pidgin de Shakespeare au baragouin de Molière
Le type m’explique qu’il a étudié le floncé dowgpuis ong gan et guil basse des exam’z pour obtenir le diblôme.
De vieux restes de langage monosyllabiques persistent dans sa diction tant et si bien qu’il faut non seulement reconstituer la phrase mais aussi les mots.
J’eusse préféré d’avantage qu’il me parlasse en british ce brave homme j’aurais pu afficher mon flegme qui me sauva de biens des situations embarrassantes, par le passé… Et contempler le paysage au travers de la vitre d’un air entendu.
Bref ! Évitant au maximum de le vexer,
je fis des efforts démesurés
( vous me connaissez à présent pour savoir ce dont je suis capable, en la matière )
continuant d’acquiescer tout en faisant semblant que j’étais ravi qu’il me parlasse en ce qu’il croyait être ma langue le brave homme..
Il faut évidemment avouer que si je devais m’exprimer en vietnamien au lieu de dire
« il fait très beau aujourd’hui et Hanoï est une ville extraordinaire, il y a même des canards qui parlent anglais »
(nó là rất tốt đẹp ngày hôm nay và Hà Nội là một thành phố tuyệt vời, có vịt thậm chí nói tiếng Anh)
je dirais ,
pensant être agréable à mon hôte
» ta mère est une grosse pouffe et ton père était bourré quand il l’a épousé tu peux me la ramener pour que je te refasse » …
(mẹ là một pouffe lớn và cha của bạn là say rượu khi ông kết hôn với bạn có thể mang nó đến tôi, tôi sẽ làm lại)
Miracle des accents toniques sur les mots d’une même phrase monosyllabique
aux mille et une possibilités de sens selon la » petite musique et l’air que l’on y chante ».
Nul doute que le tarif se serait vu doublé à l’arrivée.
………..