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« Ouais dans tes rêves… » Ou l’ogre II.

Ladies and gentlemen, I present you Koukiii!!!
(tonnerre d’aplause, brouhaha et bruits de gens en standing ovation, entrée un peu gênée de la kouki en question toute occupée à ne pas se prendre les pieds dans sa robe longue qui lui sied à merveille: elle a décidément le triomphe modeste.)

L’ogre II
Il se veut amène et plaisant, presque courtois. Il charme l’enfant de son intelligence serpentine, et lui assène ses vérités, écrase du plat du pied sa pâle opposition.
Humant le courant contre, il enfle, et sa langue blême crache déjà le feu comme aux jeux du cirque.
Ses pognes aux allures molles lui pendent le long du corps trapu, apprêtées au combat ou au jour du cochon.
Il a raison. C’est ce qu’il veut qu’on entende. Elle doit entendre sa raison insane.
Debout massif, pieds largeur du bassin, deux grosses quenouilles aux manches retroussées touchant à peine les hanches carrées, il lance fermement sa riposte programmée, étudiant son effet humiliant sur l’enfant qui doit lui faire face.
Les yeux délogés et rougis, il guette les soubresauts de son animal, et selon, attend qu’un impact lui percute l’inconscience. User de ses mains arrive sans y réfléchir, un réflexe, un déclenchement, un instinct, son crime perpétuel toujours innocenté.
Dans sa réalité, cette enfant est sa coulpe et désignée pour l’absoudre.
Le cidre âpre de midi lui a rincé généreusement le gosier, et comme chaque jour alors, il se sent fort du double, son faciès se musclant çà ou là à tressaillir des rictus qu’on croirait pour de rire. Elle sait qu’il n’en est rien, combien çà prend tournure bistre, et qu’il est dorénavant aveugle dans une lutte contre sa mort intérieure, jouée au bras de fer.
Embarqué corps et âme dans les rouages implacables de son ire antique, elle ne peut échapper à ses dangers. Le cerveau aspiré vers le fond de sa carcasse, là où se terre la colossale rage, elle connaît l’ endroit dégringolé où il lui faudra aimer le monstre pour qu’il l’épargne.
La Petite joue les poupées russes, empilée et multiple, le visage sans trop d’expression marquée, s’inclinant vers un humble sourire. Rendue muette pour ne pas ameuter de plus belle la part sauvage, elle bâillonne sa peur comme elle le peut.
Bilieuse et aguichante, cette dernière lui fait voir rouge, et dégonde sa violence. Imperceptible, prie-t-elle le divin s’il en est, le coin gauche de sa lèvre du dessous tremble, convulsif.
L’Autre, grimpé trois tons plus haut dans une transe dévergondée, vide son barillet de cartouches sonores fielleuses, le regard habité d’un homme entrain de jouir.
Concentré sur sa mire transperçant loin derrière elle, de ses mots il sévit, encore immobile, au delà du papier de la chair ou du marbre, en pays de possédés.
Cela ne tient qu’à un fil.

(texte de Kouki Rossi).
Si vous voulez lire les trois autres épisodes de cette saga de l’ogre ils sont ici:
L’ogre I
L’ogre II (vous venez de le lire).
L’ogre III
L’ogre IV (et fin)
* * *
Je me disais que j’allais faire un court intro pour présenter ce texte
mais voyant le nombre de signes, je me suis dirigé vers le postface.
avant que de mettre l’image sur  »l’ogre II »
je l’ai filée à kouki dont le texte précède…
Voulant remplacer la sienne
(très bien du reste!)
j’avais d’abord pensé à plus sombre.
Et puis celle ci s’est imposée avec cette gamine qui toise bizzarement le spectateur…
Il s’agit en fait de la dernière image de la deuxième saison de « Life on Mars ».
(Non je n’ai pas raconté la fin!)
Il faut savoir que la fille en rouge revient en leitmotiv dans les (pires) cauchemars du personnage principal (pendant son coma, en fait: inspecteur en 2006 à Londres, il est renversé par un chauffard et emmené d’urgence à l’hopital… Mais se réveille en 1973.
Bien sûr il EST dans le coma, mais l’adrénaline et le cerveau, visiblement continuent de fonctionner durant sa catalepsie et de partir en sucette).
Cette gamine étrange sert de messagère entre le monde de 2006 et celui de 1973…
C’est une série anglaise ‘achement bien fichue qui vaut son pesant de cacahuète…
Dont les Américains ont déjà fait le remake avec Havey Keitel
(seule raison pour laquelle je pourrais comparer un jour)
Moi, l’anglaise, elle me plaît bien: il n’y a pas un seul acteur beau, ils ont tous des peaux blanches de British un peu roux, bagarreurs, buveurs, bas de plafonds juste ce qu’il faut et s’expriment dans un anglais approximatif de banlieue.
Les costumes sont terriblement ringards avec ces pat’d’eph’ improbables (mais pas trop),
les chemises cintrées à motifs et cols « pelle à tarte », les vestes de cuir étriquées et les voitures au couleurs pistache ou rose… La reconstitution des années ’70 est on ne peut plus réussie dans le mauvais goût.
Comment a-t-on pu se fringuer comme çà?

Dis, elle est superbe ta robe Kouki:
pas du tout ce que je viens de décrire.
Tu fais quelque chose après le vernissage?

Huître et huître seize… Ou jamais deux sans trois disait Peugeot.

Vous vous souvenez très certainement de ce billet que j’avais intitulé
(non sans malice)
Ilunga, les poissons, il s’en fish(ait).
qui valait son pesant de cacahuète et où il était question d’huîtres…
Vous m’aviez cru, c’est assez.
L’autre jour, en regardant la télé
(je n’ai pas résisté, lendemain de fête oblige )
j’y ai volé une séquence et me suis tapé une nouvelle animation
qui unissait deux thèmes récurrents chez moi
(mais chez d’autres aussi)
je pense à « la tresse » illustrée par quelques photos liées à un souvenir
et prisent in situ à l’époque, mais aussi et surtout, à cet autre texte
… Et Ponge, tu vois le tableau? dis-je à ma perle.
dont l’humour du titre ne vous aura sans doute pas échappé, ami lecteur.
Comme vous avez déjà pu le constater,
je n’ai aucune forme d’imagination
et les bonheurs de la rédaction d’un texte qui serait de mon clavier
(avant on disait « de ma plume »,
c’était plus joli mais le monde change ) me sont toujours pénibles…
J’ai donc décidé de parer à cette lacune, de remettre le couvert
et d’enluminer par cette nouvelle image, ces mots si justes
de façon plus classe, plus sobre,
juste pour le plaisir de lire et relire encore…
Car Ponge ça se relit très bien.
Bon je file car je dois aller à la gare chercher une autre perle.
(Ce n’est pas vrai, mais ça fait toujours rêver et génère souvent des jalousies)
Je cède donc la parole à Francis et m’en vais, de ce pas, gratter mon pare brise.
(ça c’est vrai)…
Mais ce n’est pas une Peugeot.
Ouf! le titre se justifie.

L’huître

L’huître, de la grosseur d’un galet moyen, est d’une apparence plus rugueuse, d’une couleur moins unie, brillamment blanchâtre. C’est un monde opiniâtrement clos. Pourtant on peut l’ouvrir : il faut alors la tenir au creux d’un torchon, se servir d’un couteau ébréché et peu franc, s’y reprendre à plusieurs fois. Les doigts curieux s’y coupent, s’y cassent les ongles : c’est un travail grossier. Les coups qu’on lui porte marquent son enveloppe de ronds blancs, d’une sorte de halos.
A l’intérieur l’on trouve tout un monde, à boire et à manger : sous un firmament (à proprement parler) de nacre, les cieux d’en dessus s’affaissent sur les cieux d’en dessous, pour ne plus former qu’une mare, un sachet visqueux et verdâtre, qui flue et reflue à l’odeur et à la vue, frangé d’une dentelle noirâtre sur les bords.
Parfois très rare une formule perle à leur gosier de nacre, d’où l’on trouve aussitôt à s’orner.

(F. Ponge, Le Parti pris des choses, 1942)

En ce début d’année…


Des baisers à l’infini.
* * *
(Lundi il y aura peut être une carte postale d’Honoluluc.)

Le naufrage du p’tit Anick.


Ce n’était qu’un demi mâle,
cent fois venu s’échouer à ses pieds
pour être sûr que la prise soit bonne,
qu’il disait;
fier de son corps,
dard sur l’horizon,
Narcisse dressé,
elle ne voyait plus que cette gerbe,
un peu ridicule,
à l’image de leur brève union.
Elle préfèra garder de lui,
non sans humour,
ce souvenir
se rappelant qu’en dehors d’elle
(un peu)
de lui,
(beaucoup)
il adorait faire des photos de phares,
sur les plages,
(passionnément)
lui demandant toujours avec un clin d’oeil malicieux mais néanmoins salace
« ça ne te fais pas penser à moi? »

Pas du tout.

.

Petits papiers.


Lui mordre la nuque là

En fond de cale

Elle le toise et tangue

Fume des brunes qu’elle écrase

Sur le franc bord

Trace de rouge gras sur le papier diaphane

Elle est dans ses petits papiers

Çà fait un moment et

Quand elle marche sur la dune

Où les hommes brulent

Elle crane

Il veut lui mordre la nuque

Aplatie en fond de cale
.
.
.
.
.
Le texte du jour est de Kouki, que je remercie de cette mise en lumière,
par les mots, de mes images: le crayon et la plume en somme.
(Après tout, étymologiquement, n’est ce pas de là que vient le terme « illustration »?)
(kou)qui s’en étonnera? allez la lire.

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