« …
Elle – Il est à toi ce livre ?
Lui – Non je l’ai trouvé ici.
Elle (demandant une cigarette) – Tu m’en donnes une ?
Lui (donnant la cigarette) – C’est notre histoire,
un peintre qui fait le portrait de sa femme
Tu veux que je continue ?
Elle – Oui
Lui – … Et, en vérité, ceux qui contemplaient le portrait
parlaient à voix basse de sa ressemblance
comme d’une puissante merveille
et comme d’une preuve non moins grande
de la puissance du peintre que de son profond amour pour celle qu’il peignait si miraculeusement bien.
Mais, à la longue, comme la besogne approchait de sa fin,
personne ne fut plus admis dans la tour,
car le peintre était devenu fou par l’ardeur de son travail
et il détournait rarement ses yeux de la toile
même pour regarder la figure de sa femme
et il ne voulait pas voir que les couleurs qu’il étalait sur la toile,
étaient tirées des joues de celle qui était assise près de lui
et quand bien des semaines furent passées
et qu’il ne restait que peu de choses à faire,
rien qu’une touche sur la bouche
et un glacis sur l’oeil
l’esprit de la dame palpitait encore comme la flamme dans le bec d’une lampe
et alors la touche fut donnée
et alors le glacis fut placé
et, pendant un moment, le peintre se tint en extase devant le travail qu’il avait travaillé
mais, une minute après, comme il contemplait encore, il trembla
et il fut frappé d’effroi
et criant d’une voix éclatante :
en vérité, c’est la vie elle même !
il se retourna brusquement pour regarder sa bien aimée…
Elle était morte. »(*)
…
(Sab.)
…
Wispra trouvait ce garçon bien étrange,
ou peut être était-ce le thé ?
…
(*)(Dialogue de « Vivre sa vie » de J.L. Godard).
à propos de cela, lire aussi ceci où il dit :
Quand je filme un visage il y a deux choses : Je filme ce visage parce que j’en ai besoin pour le film, mais derrière cela apparaît autre chose, le visage de l’acteur lui-même. Et le processus qui consiste à photographier ce visage. Et ça change toujours le but initial que je poursuivais dans le film.